le pays de partout

j’avance funambule

sur un cable un peu fragile 

manière de pointillés inexorables

je néglige le point final tout au bout là-bas

en cet étrange pays de nulle part

que je ne verrai pas

je préfère observer l’avance des nuées

prévoir le temps qu’il fait à défaut de l’autre

patauger sous la pluie

prendre garde aux ornières

c’est ma voie privée oui

mais je me demande si je ne me suis pas fourvoyé

taillis bosquets hêtres chemins de halage

le canal droit vers l’horizon 

tiens c’est celui de l’enfance 

c’est un autre et c’est lui pourtant 

jadis au long de l’eau

les cimes se hissaient jusqu’aux pluies 

les peupliers étaient cent couleurs 

alignés sur le fil de mes rêves

ils étaient changeants joyeux frémissants

en cet automne leur majesté s’émousse d’avoir trop balancé

arêtes qui se taisent en ligne 

j’ai beau pousser mes pas

les chuchotis d’été 

étouffés sous les feuilles

s’endorment sous les semelles 

j’ai bien peur que l’hiver monotone etc

allons allons

songe à ces printemps qui t’attendent

au pays de partout