fièvre d’écrire

hommage à Bernard Noël

penché en avant 

au bord de l’étouffement

j’envisage le vide à vivre

et l’horizon là-bas j’aimerais tant 

l’apprivoiser du bout des lèvres 

murmure pour le malheur

rivé dans la vallée fatale 

le fièvre enfle avec l’ouest

ils tombent les amis les vivants

ma main ne les retient plus au globe

la terre est grave

je les tire par les bras les jambes

mais de l’écrire n’aide pas 

la vie me contredit elle va elle va

le crescendo du virus fait boule de neige 

en ce printemps fou de pâquerettes

nos paumes battent au crépuscule 

luttant avec les coeurs qui s’en vont

et pendant que j’écris 

des non nommés

à pleins bras

à corps perdus

affairés

donnent donnent donnent

pour d’autres heureux anonymes 

qui finiront je le jure je l’écris

par retrouver leur souffle

4 réflexions sur « fièvre d’écrire »

  1. Poésie ininterrompue en quelque sorte : vous êtes impressionnant

  2. Heureuse de voir que vous ne l’oubliez pas. Bernard Noël, une vie d’écriture. Un homme silencieux et solidaire.

    1. Ma timidité m’a empêché de poursuivre une conversation que nous avions engagée sur Hofmannstahl; il habitait à quelques kilomètres de Laon. Il écrivait à l’époque sur la Commune et il était tout plein de colère contre Thiers, ce que j’entendais parfaitement. On sentait l’homme entièrement investi dans l’écriture. Profondément émouvant.

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