fièvre 43 masques (juillet 2020)

43

masques

il y a beau temps 

que l’avenue a dissout les rires aux quatre vents 

passants du silence

dites 

que sont vos visages devenus

je vois bien le mien au miroir du matin

mais les vôtres

barrés de ce pansement grave

blessés d’on ne sait quelle guerre 

vous avancez dans un brouillard diffus 

présences spectrales

barbouillées de blanc de bleu 

je vous entends à peine

je vous dis bien le bonjour

mais vous semblez murmurer

les voix vos voix me font défaut

englouties sous ces masques têtus

hélas parfaitement justifiés

(étouffons un peu 

pour ne pas étouffer tout à fait)

et manque affreux

l’absence de nos lèvres

nous rend tous égaux en laideur

la partie nue émergée de notre corps

ce visage qui faisait notre identité

iceberg de nos émotions

voilà qu’il est littéralement

défiguré

reste le miracle des yeux

oui les regards sourient

dans la nuit blanche de l’été

leurs reflets n’ont jamais été aussi beaux

cils et sourcils sont devenus des signes 

aussi importants que les gestes

perché au dessus du masque

le clin d’oeil se risque alors en lieu et place

de nos mains interdites 

et des paroles mal osées