Eloge du Teppaz (Brassens ou le désaccord parfait)

C’est un des personnages principaux de mon “Brassens ou le désaccord parfait”. Les grattements les chuintements y sont évoqués dans la voix de Brassens. La circularité donne à la rengaine son véritable instrument. La pose du “diamant” a des charmes incompréhensibles pour les non initiés. Le craquement des poussières, la plage (la plage!) sont des moments qu’on n’oublie jamais. Il n’y avait rien, et soudain quelque chose advient et chante; de l’inouï; on dirait que cet adjectif inouï a été inventé pour le Teppaz. Une correspondante mentionne l’importance de cet instrument de musique, portatif et magique, elle a raison. On songe à la dépression d’après guerre; il y a un remède; c’est le teppaz qui tourne et danse dans les chaumières. Ce qui est encore plus beau, ce sont les déraillements du Teppaz. La machine électrique déraille si le disque est zébré d’un ongle malhabile. Disons le, tous les disques du Teppaz étaient rayés et donc pour dépasser cette blessure, il fallait attendre le bon moment, le mauvais moment donc, pour pousser le diamant, ce qui agrandissait la rayure, comme les bas nylon de l’époque. C’était incurable et sympathique, car la douleur de la pointe qui passe et repasse le même passage vingt fois trente fois inscrit définitivement la chanson dans sa redite infinie et fabuleuse.

(“Brassens ou le désaccord parfait” éditions mille sources: gilbert.beaubatie@gmail.com. Tél : 05 55 26 27 77)

7 réflexions sur « Eloge du Teppaz (Brassens ou le désaccord parfait) »

  1. Oui, j’avais bien aimé la naissance de ce livre à l’écoute du premier vinyle. Il y a des émotions multisensorielles qui inscrivent pour toujours la forme d’un destin. Fantôme d’une doublure dans un univers parallèle. Figure nomade qui accompagne toujours Raymond. Le temps alors s’arrêta.
    Eternel retour… comme celui des hirondelles, qui fait de l’un et l’autre les habitants d’un même instant.
    Ainsi Raymond fait revenir en rêve Brassens pour un temps infini. Il a suffi d’un Teppaz.

    1. “Tout est là” dit Raymond en désignant son front. Purement imaginaire. ce sont des mots, et pourtant, l’effort musical donne envie d’en savoir davantage. Même les hirondelles qui fouettent le pavement avant de partir, ont un rythme stimulant.
      Tout peut revenir: c’est la musique dans les mots qui produit ces présences réelles. Hallucinons contre l’inexorable du temps.

      1. En aparté, j’aime beaucoup “les hirondelles qui fouettent le pavement avant de partir.”
        Quel art de l’esquisse !

        1. J’ai toujours l’impression qu’elles nous disent au revoir un peu comme une revue à la fin d’un spectacle de cirque… Il y a comme une mélancolie dans leurs acrobaties ultimes.
          Tiens je vais garder l’idée: ultimes acrobaties mélancoliques…. on dirait un vers forgé exprès pour le mois d’août. Vous ne trouvez pas que le mois d’août a comme des sanglots dans la fournaise? il dit: Je te donne cette chaleur pour que tu y penses le reste de l’année et qu’elle te dise que vieillir n’a pas que des inconvénients; un autre août viendra avec son cortège de canicules. (Pensées hérétiques au temps du “global warming”.)

  2. Ce soir sur LCP (public sénat – 13), spéciale Georges Brassens entre 21h et 23h.
    Invité : Maxime Le Forestier.

  3. Quelques petites choses :
    – j’habite paris 15e, à quelques encablures du parc Georges Brassens et de l’impasse Santos-Dumont. Cette année j’ai hélas loupé les journées Brassens.

    -Le Teppaz de mon père : c’était le modèle TEPPAZ 336 PU

    1. C’est bien d’y penser: Santos Dumont est une adresse précieuse pour un brassensophile !
      Quant à la mention du Teppaz, il y a de l’émotion dans l’air ! Merci.

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