brillants

ainsi auront ruisselé du collier

des heures des mois 

(gouttes de sang blêmes)  

des paroles graves 

des perles de nuits lunaires 

j’ai eu des joyaux de jours vite jetés 

j’ai marché sans rien vendre

(étourdi des boulevards que je suis)

ami des oiseaux qui fuient le nid 

ne tiennent pas en place 

j’ai perdu une à une les perles les brillants 

plus que frivoles

me voici épelant ces années 

les syllabes s’efforcent 

non seulement de chanter

(le premières cordes vocales savent cela)

mais aussi d’orpailler

au lit du ruisseau 

là où roulent les pierres de touche 

poèmes qui fondent notre temps perdu 

puis gagné et demeurent

posées là 

belles bientôt comme l’évidence 

à cheval sur passé présent 

miroitant vers ce qui vient

3 réflexions sur « brillants »

  1. Ce déploiement de l’intime, le plus domestique parle, et du temps cosmique, et du bref éclat de nos existence, dans cet écart ou se pose le mot, jamais définitif, c’est cela ton poème. Je viens de le comprendre.

    1. Disons comme tu le dis si bien ! Il n’est question que de l’instant que l’écrit amidonne. Un brillant dans la nuit de l’écrit, voilà qui est contradictoire…
      Merci Eric !

    2. Mes textes s’écrivent entre le très conscient et le dessous ou le dessus que je ne prévois jamais. Ce sont des textes qui subjectivement tentent de rallier les êtres humains au niveau inconscient; même si tout n’est pas limpide, il est une musique de fond qui est la même pour tous (car nous sommes embarqués dans le même temps).
      Je suis dans l’écart que tu désignes entre le très concret et l’univers; ce mélange en quelques lignes me fascine.
      C’est donc un lieu très ouvert et un temps qui court sous le présent très concret : le nôtre.
      Le lexique fuit là devant le plus souvent en cascade d’environ trente vers qui basculent vers le milieu de la suite des vers, disant souvent l’inverse de ce qu’a dit le début. Du réel à l’envol, puis retour en une fin qui se veut souvent concise, vraiment conclusive et qui ne vient que rarement au début et ne se dévoile à moi que vers la fin. Ici rôde l’aventure, je ne sais pas ce que sera la fin qui devra ramener au début, forcément d’une autre manière.
      Il se produit un auto engendrement où je ne contrôle plus rien, sinon la musique. Je n’oublie jamais que c’est un chant : le sens n’est pas ma préoccupation principale, la mélodie m’aide à demeurer au dessus du sens et la cascade m’aide à faire bruire le petit filet d’eau qu’on peut appeler poème si on veut ( je n’y tiens pas tant que ça).
      J’évoque au début la volonté de rallier les êtres humains, mais ce n’est pas ça tout à fait. Non, c’est le monde autour qui au contraire vient bruire à l’intérieur de moi, et dont je restitue le contenu, l’allure, en bref la musique. J’essaie d’écrire, pour le dire prétentieusement, sous la dictée du temps présent. Ce n’est pas vraiment conscient ni non plus inconscient; je dirais que c’est entre les deux; peu importe le nom qu’on donne à ce lieu.

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