Alban Nikolai Herbst: Misère de la musique (4/9)

Pour ne pas éveiller l’attention du terroriste, la troupe se glissa de l’autre côté du bâtiment en rampant jusqu’au mur de derrière. La file s’immobilisa dans l’attente de l’ordre décisif. Il pleuvait toujours à verse. Tous étaient frigorifiés. La pluie acharnée faisait gonfler les parkas.  Les protections en plastique individuelles n’étaient d’aucune utilité. La troupe se sépara. Quelques hommes se glissèrent par les soupiraux, d’autres par les fenêtres du rez-de-chaussée. Un troisième groupe escalada la façade pour sécuriser le toit.
Les hommes plantés sur la place étaient également de mauvaise humeur. Le téléphone de la voiture sonna. Un jeune inspecteur décrocha.
– C’est lui, dit-il.
– Qui ça?
– Eh ben, le salopard…
– Ah, enfin, dit Michels.
Mais il déchanta vite.
– Ecoutez-moi, dit le terroriste. Si dans quatre heures les camarades ne sont pas libérés, toutes les trente minutes je couperai un doigt d’une des femmes.
La liaison s’interrompit dans un claquement sec. Michels fixa l’écouteur gris. L’eau lui coulait sur les sourcils, sur les cils, le long du visage et, glissant sur sa nuque, elle se faufilait jusqu’au col.