19
je me souviens de la vague folle
qui retomba en longs plis mélodieux
la mer chassa les mouettes de son unique souffle
et l’effroi criard de ces enrouées
fit écho à ma chute dans la glace montante
Le blog de Raymond Prunier
19
je me souviens de la vague folle
qui retomba en longs plis mélodieux
la mer chassa les mouettes de son unique souffle
et l’effroi criard de ces enrouées
fit écho à ma chute dans la glace montante
18
les esquifs de papier que je délivrais en amont
resurgissaient vifs hors des piles du pont
pantins sur vaguelettes ils filaient loin
en route vers l’horizon j’interroge désormais l’océan
dis-moi où sont passés mes bateaux
l’à peu près des jours est notre chance
un sourire indulgent s’esquisse avec le pas
le vol n’étant permis qu’aux oiseaux
je me plais à sauter les flaques et les ornières
rythmant joies et risques sur le fil de mes refrains d’enfant
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elles n’ont eu de cesse de bricoler leur nid
cent générations à manier galets et gadoue
toute ma vie j’ai vu les mêmes et différentes pourtant
hirondelles qui se suivent et se couvent en secret
dans le castel où sous mon toit elles miment l’éternité
ne suis-je pas tout compte fait leur locataire provisoire
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les trames du matin au fond du lit
esquissent des espérances miraculeuses
une fois debout chaussons aux pieds
je traverse hésitant la brume du salon
croise le miroir et me souhaite un bonjour quand même
14
sous mes doigts le soir s’éteint au chevet
j’abandonne la terre à l’univers
mon corps consent à s’absenter
joues et rêves s’échangent sur l’oreiller
puis vient l’embaumement familier de la nuit
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dès l’aube dit l’oiseau à l’azur
je serre un galet en remontant vers toi
au plus cru de ton bleu
et je relâche la pierre pour mesurer l’espace
où mon chant va porter les échos de ta joie
un hibou dans la nuit
c’est un assaut velours
contre le vertige des étoiles
rempart d’échos
qui protège les rêves
11
quand le grain de ma voix m’échappe
que les mots meurent au désert
tout au fond de ma gorge sèche
le roc de mon âge souffle un vieil air
ma mie s’enchante au seul appel de son prénom
et nos pas glissent de concert vers l’oasis
les enfants se tutoient
de leurs voix flûtées
ils s’avouent de graves secrets
montagnes d’énigmes
qui plus tard s’effacent dans la foule
au premier passant qui leur dit vous
l’août violent explose
en larges râles grinçant
contre les vagues câlines et sûres
elles roulent insatiables
ce littoral caillouteux qui fait craquer
les vertèbres de nos corps incongrus
C’est un des personnages principaux de mon “Brassens ou le désaccord parfait”. Les grattements les chuintements y sont évoqués dans la voix de Brassens. La circularité donne à la rengaine son véritable instrument. La pose du “diamant” a des charmes incompréhensibles pour les non initiés. Le craquement des poussières, la plage (la plage!) sont des moments qu’on n’oublie jamais. Il n’y avait rien, et soudain quelque chose advient et chante; de l’inouï; on dirait que cet adjectif inouï a été inventé pour le Teppaz. Une correspondante mentionne l’importance de cet instrument de musique, portatif et magique, elle a raison. On songe à la dépression d’après guerre; il y a un remède; c’est le teppaz qui tourne et danse dans les chaumières. Ce qui est encore plus beau, ce sont les déraillements du Teppaz. La machine électrique déraille si le disque est zébré d’un ongle malhabile. Disons le, tous les disques du Teppaz étaient rayés et donc pour dépasser cette blessure, il fallait attendre le bon moment, le mauvais moment donc, pour pousser le diamant, ce qui agrandissait la rayure, comme les bas nylon de l’époque. C’était incurable et sympathique, car la douleur de la pointe qui passe et repasse le même passage vingt fois trente fois inscrit définitivement la chanson dans sa redite infinie et fabuleuse.
(“Brassens ou le désaccord parfait” éditions mille sources: gilbert.beaubatie@gmail.com. Tél : 05 55 26 27 77)