je t’attendais
je sais bien soleil que tu tournes comme tu peux
mais là fin décembre
je me demandais
avec mes 76 ans sur les bras
si tu cesserais enfin de te dérober
à mes yeux à ma peau
et voilà que soudain
triomphant
tu arroses mes pas donc mes pensées
comme si le printemps déjà avançait son nez rouge
la peur ancestrale vaincue
je tapotais sur la vitre croisée
appelant les oiseaux à t’enchanter
pour te décrocher de ce lieu du ciel
où tu t’oblitérais
bon vieux soleil
mon ami d’écriture
te voilà avec des théories d’ombres douces
tenancier du bar des nuances où l’on rêve
les décombres de l’automne enfin mort
jonchent le sol où tout froisse
nous n’irons plus au déclin
scruter les rougeoiements entre les troncs
– nos vitraux naturels –
l’oppression lente a cessé de peser
de descendre en décembre
naissant comme à Nazareth
le savoir va s’ouvrir tout neuf
la peine versifiée ne va plus régresser
le pire sera emporté par avril proche
mélancolie comme brume
vont lever enfin sous ton éclat
leur paresse facile
et nos poumons vont exploser de rires
interminables
Bonne année M Prunier.
Pour faire suite à “Sylvestre”, un poème de l’écrivaine Ursula K. Le Guin :
Dans la forêt, le grand arbre se consume doucement
dressé dans le léger creux de la neige
que fait fondre autour de lui la chaleur subtile et tenace
de son être et de sa volonté d’être
racines, tronc, feuilles, et de connaître
la terre noire, le soleil éclatant, la caresse du vent, le chant de l’oiseau.
Sans racine, sans répit, êtres au sang tiède,
nous brûlons de ce brasier qui nous rend
aveugles à ce haut frère lent, feu de vie aussi vigoureux
aujourd’hui que dans la jeune pousse il y a deux siècles