souffle 3 et 4

la pensée d’une automobile

leur fait horreur

ils dénichent une carriole bleue chez les gitans

l’achètent il la rebricole elle panse le cheval

elle lui parle évoque son pas et les vagues

le régulier des syllabes plaît à la bête qu’elle nomme Dactyle

c’est un rythme qu’elle lui donne il fait oui

Dactyle calque son pas sur les chants qu’elle murmure

les lavandes bordent leur avance

la mer se blottit contre les rocs

où ils campent à l’écoute du premier temps

ils vont par les villages aux fontaines de pierre

boivent rêvent serrent les pauvres gens dans leurs bras

bourrent de pain les poches des petits

Souffle 4

ivres de vent ils s’endorment sous les platanes

refusent en souriant les lits de hasard

la carriole est si douce disent-ils

pensant à la peau de l’aimé

la belle étoile habille nos rêves dit-il

c’est ma liberté arrachée à la nuit du temps dit-elle

sous la tramontane ils se serrent sous la bâche voile

ce sont des enfants étonnés d’être vivants encore

habillés de hâte et de sourire

ils se réjouissent d’être célèbres certes

mais rêvent qu’on oublie leurs chansons

pour respirer sans passé

elle songe que les pauvres gens feraient mieux d’emprunter

le chemin mouillé de l’estran où l’on renaît au présent