chant XI

s’enfoncer dans la saison 

c’est aller vers la nuit 

où coulent indifférenciés

astres et lunes 

ainsi l’automne exige-t-il un chant 

c’est le temps du courage

avec ses cimetières gorgés de chrysanthèmes

où le gel plane menaçant

je pense aux mains hardies 

qui soupèsent les jeunes pousses 

arrachent encore des herbes superflues 

pour organiser l’attente grave d’hiver

les froids jouent déjà sur les visages

je pense à ceux qui ont quitté la maison 

et savent qu’ils ne reviendront pas 

ils partent en sifflant des airs d’amour 

perdu et les minuscules aurores

tracent leurs frissons sur la lande

la saison s’entête à périr

aucune prière ne vaut 

je me demande s’il y aura un hiver 

avec son petit monde très sec

et la voix qui porte au loin l’espoir

au travers des taillis verglacés

stalagmites tremblant du nouvel an