Ce poème de Raymond Prunier a été traduit par Helmut Schulze et illustré par E. Detton.
Un père
Il avait fait cent mille pas
Il avait même tenté de dormir deux cents nuits
Depuis la seconde où il l’avait appris
Mais il était resté sur la place à jamais
Debout
Stupéfait
Granitique
Sourd à l’instant
Aux chants des oiseaux et surtout aux pas des enfants
Aux ris du soleil contre la grille aux gonds secs
L’horloge aurait dû arrêter de carillonner
Quand le maire avait osé dire – neutre féroce grave –
Il est mort ton gars ton soldat
D’autres mots s’étaient bousculés
Héros médaille champ d’honneur
Il avait repoussé le maire des deux mains
Il avait senti qu’’il n’oserait plus dire
Mon fils
Il le revit éclatant de rire dansant sur les labours
S’essayant contre les flaques aux folies bicyclette
C’était fou
Il avait fallu ensuite
Rouler une cigarette acheter le journal boire avec femme et amis
Toutes choses à jamais impossibles impossibles impossibles.
Ein Vater
Er hatte sogar versucht, zweihundert Nächte zu schlafen
Seit der zweiten, da er’s erfahren
Aber er blieb auf dem Platz für immer
Stehen
Benommen
Steinern
Taub geworden
Dem Gesang der Vögel und mehr noch den Schritten der Kinder
Den von der Sonne angestrahlten quietschenden Scharnieren
Die Uhr hätte nicht weiterschlagen dürfen
Als der Bürgermeister zu sagen wagte – sachlich grimmig gewichtig –
Tot ist dein Junge dein Soldat
Andere Wörter drängelten sich vor
Held Medaille Feld der Ehre
Er stieß den Bürgermeister mit beiden Händen von sich
Er spürte, er würde sich nicht mehr trauen zu sagen
Mein Sohn
Er sah ihn wieder lachend und tanzend beim Pflügen
Wie mit dem Fahrrad er Pfützen aufspritzen ließ
Zum damisch werden
Dann dauerte es
Eine Zigarette drehen die Zeitung kaufen ein Glas mit Frau und Freunden
Alles auf immer pas possible pas possible pas possible