Sibylle

(Il est à Laon au porche nord de la cathédrale une sibylle dont il convenait de chanter la présence) 

la tendre sibylle chuchote là devant

ses propos 

rameau d’or dans une  main

livre de chant dans l’autre

sont tenus sous le joug du murmure

elle parle en se taisant dit la légende

je crois que ce qu’elle dit est une viole

si douce qu’on a beau lui prêter l’oreille 

elle n’enchante que ceux qui ont le tympan créateur

rêveurs du vent amoureux de l’amour

ceux qui vivent fort mais rient en secret

la sibylle fait trembler le monde

pas le bruyant du commun

non 

celui qui roule sous le drap

sous chaque drap sous chaque toit

elle crie gémit souffle

lâche son rameau et son chant aux cordes tendues

puis s’enfuit dès que les bras renoncent

laissant à l’ouïe du musicien 

des manières de sarabandes graves

la sibylle a cette sublime voix de mezzo

les aigus se perdent puis reviennent

et la belle aux yeux pers

se rassure en songeant qu’on va vers l’été

quand la saison gémit aux charmilles

il y aura encore encore d’autres draps 

d’autres pas tout aussi doux

et la voix de joie montera encore 

c’est le mystère de la sibylle

on ne peut quand même pas

tout prévoir