25
quand la saison s’incline
le regard peu à peu s’humanise
les paupières visitées des nuages
s’ouvrent sur les rocs qui se pressent au ruisseau
j’en oublie la torpeur du vieux juillet torride
Le blog de Raymond Prunier
25
quand la saison s’incline
le regard peu à peu s’humanise
les paupières visitées des nuages
s’ouvrent sur les rocs qui se pressent au ruisseau
j’en oublie la torpeur du vieux juillet torride
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Pourquoi votre poème fait-il surgir de ma mémoire ce poème d’Apollinaire ?
https://www.poesie-francaise.fr/guillaume-apollinaire/poeme-les-colchiques.php
On trouve chez Claude Levi Strauss une analyse de ce poème dans ces merveilleux petits livres qu’il écrivit lors de son long et riche crépuscule. J’en ai oublié la référence, excusez moi…
Eros et Thanatos…
Amour et souffrance…
Et cette chanson ancienne que vous avez peut-être connue :
“Colchiques dans les prés
Fleurissent, fleurissent
Colchiques dans les prés
C’est la fin de l’été”
Mes enfants vous diraient que je la chantais constamment à cette période de l’année. En fait le REFRAIN au début est très difficile à décrocher, mais indispensable pour rendre la chute des feuilles: “La feuille d’automne/ emportée par le vent/ en ronde monotone/ tombe en tourbillonnant”. [ C’est ça le refrain]
Les strophes ont un texte magique: d’abord “le colchiques” que vous citez puis en deuxième
“Nuages dans le ciel/ s’étirent s’étirent/ nuages dans le ciel/ s’étirent comme une aile”.
La troisième strophe est entièrement mélancolique; aucun texte de notre langue n’atteint cette candeur profonde:
“Et ce chant dans mon coeur/ murmure murmure/ et ce chant dans mon coeur/ murmure le bonheur”
Comme pour les cathédrales il y a peut-être un auteur anonyme. Simplement bouleversant.
Magnifique.
Peut-être à cause des “paupières visitées des nuages”. C’est une image qui mevoque aussi un tableau de Magritte.
Oui, il y a quelque chose de ce genre; surréalisme belge, si cruel et si doux.
“surréalisme belge, si cruel et si doux.”
Oui.
Pour cette fin d’été, un parfum indécis de tilleul en fleurs, de foin coupé, de roses musquées et sur la langue le raisin sucré . Les yeux mi-clos, les ors ensorcelante et assourdis sur le ciel d’un rose fané que le soleil quitte.
Mais châtaignes roulent sous les pas. C’est assez pour la bonté de la saison.
Ah j’aime bien votre “bonté de la saison”. C’est le temps – plus qu’au nouvel an- où l’on fait les comptes, les fruits nous tombent aux mains, dans le silence, les jours sans vent; tout soudain la chute de la pomme se fait événement. Je me souviens ainsi de la chute d’une pomme sur le dos d’une vache dans la campagne, loin de tout, en bel automne, il m’a semblé que le choc allait faire vibrer la terre entière; pour me rassurer la vache n’avait pas bougé, pas un frémissement, rien, comme s’il ne s’était rien passé. La pauvre vache qui n’attendait pas la révélation newtonienne, n’avait rien senti. Je la fixai comme pour l’hypnotiser, mais va hypnotiser une vache au moment où les herbes repoussent après que l’été “ont l’herbe rajeunie”. J’eus l’impression au contraire que le choc sur sa peau anticipait les tambours que l’on ferait un jour de sa pauvre peau. Coup de gong, comme on appelle au repas chez les aristos. J’ai revu alors le moment où la pomme s’est détachée, pourquoi cette seconde plutôt qu’une autre? qui ou quoi avait suscité ce détachement? Il m’apparut alors que la peau de vache la pomme et ma présence solitaire devaient être entendues comme une musique sans musique autre que mes battements de coeur. La tête m’a tourné, l’odeur des pommes aidant je fus environné d’une atmosphère qui me revient lorsque j’écris le mot “automne”. Au bord de l’évanouissement sans cause, j’en conclus que le mûrissement des pommes à l’origine du geste d’Eve, n’avait pas que des bons côtés, le pourrissement n’étant qu’un mûrissement exagéré, un peu trop poussé. La cueillette est son anticipation. Curieusement lorsqu’on mord dedans elles donnent au palais une sensation de printemps qui n’a rien à voir avec les feuilles mortes et le mugissement désolé de la vache. C’est du printemps “prochain”, c’est notre prochain.
Je viens de confondre une odeur et une couleur. En automne c’est la lumière qui habite le feuillage du tilleul pas les fleurs, en grappes de feuillage d’un jaune d’or éblouissant.