le silence serpent se glisse à l’intérieur des mots
il dit c’est toi c’est moi mais ne siffle jamais nous
nos paroles posées sur le vide ont du jeu
un courant d’air ferme une porte quelque part
je sursaute et me revoici vivant ouvert souriant
Le blog de Raymond Prunier
le silence serpent se glisse à l’intérieur des mots
il dit c’est toi c’est moi mais ne siffle jamais nous
nos paroles posées sur le vide ont du jeu
un courant d’air ferme une porte quelque part
je sursaute et me revoici vivant ouvert souriant
l’avril rustique frémit hardiment vers le tiède
avant l’aube les éclats pincés d’oiseaux tapis
anticipent la lumière sans fin des joies de juin
pourtant l’enfance de l’an y accroche encore ses lèvres
elles seules balbutièrent alors les mots argentés du vivant
les rares aigus des enfants perdus dans la cour de l’école
s’étouffent sous quelques pas qui claquent sur un faux rythme
c’est un ensemble maladroit qui joue sa musique jusqu’à l’avenue
les notes émiettées dans le silence éclatent à travers l’air froid
des cris de joie isolés craquent longtemps sous les arbres roses
qu’advienne quelque avanie affront trop humain
en toute saison je ferme les paupières
j’invente un printemps de val blond et de lac
où affluent les fausses notes de canards graves
bourrasques de rires que rythme le gracieux ressac
la pure glace ne brûle plus mes bronches
l’air attiédi me fait oublier la gorge encore piquée
se mêle au vent léger le ramage des oiseaux bâtisseurs
ma voix s’efforce de chanter claire – finies les vapeurs aux lèvres
le manteau garde l’hiver suspendu au silence de l’entrée
quand dès l’aube tout chiffonné je ravale ma façade
m’apparaissent cruelles les craquelures du crépi
la vérité s’étale sous les tendres passages des phalanges
mes yeux créanciers de mes rires délaissent l’ironie
et je me quitte après avoir face à la glace salué ma bonne vieille maison
après avoir gazouillé hirsute dans les brindilles
le passereau se serre sur lui-même soigneusement
plume à plume et à l’instant des lueurs mortes
son corps soudain noirci s’abandonne à l’arbuste grave
l’enchanteur du ciel semble alors une obscure motte de terre
remontant le cours de la rivière
un formidable rire nous saisit
quand nous nous sommes reconnus
un peu vieillis chacun sur une rive
– nous n’avons jamais trouvé le pont
quand tombent les chatons sans bruit
sur le miroir étale des eaux noires
leur douceur brise l’ombre glacée
autant de fruits perdus pour la lumière
noyés dans les flots délicats du joli lac
la vivacité amusée de son visage
reste ancrée au fond de ma mémoire
son absence me demeure impensable
puisque nos voix toujours dialoguent
ainsi mes relations avec mon fils
tu me dis que le printemps est presque là
j’aime quand ta voix accroche sur presque
et printemps c’est comme un sourire
de consonnes qui balaye dans son souffle
l’hiver tardif et les chants de noël
bouches peaux et corps s’interpénètrent
elle et lui s’adorent sous la foudre de mars
les frontières de l’un s’ouvrent à l’accueil de l’autre
c’est le même jeu de joues chaudes et d’odes à la joie
ces rouges fusions font l’amour et la paix
voies et chemins sont bouchés par le mal
quand allons-nous retrouver la belle allure
lorsque nos semelles ne touchaient plus le sol
oh nos bras nos jambes tes cheveux noués serrés
et ta voix de soprane étouffée sous le masque
tu ne t’approches pas alors comment s’entendre
tu t’approches trop près comment éviter le choc
toujours ma présence tes humeurs vont vers la bousculade
le respect nous préserve de la dévoration réciproque
l’art d’être à l’autre est ce sourire où les dents restent au palais
les tartines de l’aube s’élaborent sous les socs rugueux
la terre tranchée accueille les assauts des pluies bleues
du soleil cru bientôt les épis cèdent sous le vent
ça balance de joie en un rythme ralenti profond
pour finir le pain grillé sous la dent se fait sourire craquant