les pétales accueillent la pluie en toute fragilité
bien qu’ils soient fils du soleil
ils changent de teinte
s’exaltent d’être bénis
la peau qu’ils miment en corolle appelle ma main
si bien que le doigt qui la touche
est tout habité de moi et de pluie
j’ose toucher une seconde fois
au risque de tout briser
un frisson encore
puis plus rien
je songe qu’on a raison pour l’amour
le bouquet s’en vient figurer
les peaux qui se frôlent
qui s’effleurent
- oui qui s’effleurent bien sûr –
levant les yeux j’embrasse prairies et vallons
et l’inconcevable tapis de senteurs me chahute
on ne sait pas pourquoi cet éveil ce surgissement
après l’atone anarchie des friches d’hiver
les lèvres me palpitent
les prés semblent une réponse sans question
les couleurs se nuancent au gré des nuages
et ma main s’attarde
sur la balustrade du château des songes
où j’invite d’un geste
le monde à pénétrer en moi
habitué que je suis
à écrire seul en mon petit pays
semé de fleurs
et de questions longuement polies