J’éprouve la délicieuse sensation d’un automne qui n’en finit pas. On aperçoit à travers le doré découpé des bouleaux des trouées où l’on découvre enfin la forêt… ainsi les feuilles tombent réellement, c’est indéniable et les allées bordées de troncs sont des tapis de haute lisse longuement ouvragés par la chute des feuilles et les foucades du vent, l’ouest, le fabuleux, celui qui respire avec nous, ses poumons étant à l’inverse de la rotation de la terre. Ainsi donc à travers les feuilles persistantes on aperçoit la vérité des forêts; l’ombre n’était au fond qu’une fraîcheur douce qui nous rendit dupes du bonheur. Hic et nunc, c’est bien mieux qu’en juin; c’est un mélange de terre et de lumière, brun et ocre mêlés, la nuit et le jour, la mort et la vie, en équilibre parfait. Mon pas sur le tapis des feuilles mouillées rend un son minimum et l’on perçoit avec une verdeur souriante, les appels affolés des merles du soir.
Je crois que ce temps est le mien. Je suis comme le bouleau, dépouillé et parfois défait, mais quelque chose persiste que la lumière de l’esprit réchauffe. Les allées qui vont vers la nuit sur une moquette épaisse et humide de feuilles pas tout à fait mortes donnent une idée du chemin qu’il me reste à parcourir. C’est une énorme chance. Pause bien heureuse avant l’avalanche.