petit poème d’automne 3

33

la glace lance ses premières arias

les sournois courants d’octobre

s’en vont mordre les omoplates 

suivront rhumes pâles  et longs frissons surprises

puis la voix s’enrouera sur la route d’hiver

les pulls ne suffiront bientôt plus

contre les bises jalouses

c’est ainsi qu’elles encombreront

de leur souffle d’acier

nos fragiles cordes vocales

qui voulaient trop chanter le retour du givre

4 réflexions sur « petit poème d’automne 3 »

  1. Le paysage imaginé naît dans le souvenir et semble s’emboîter sur le paysage intérieur du poete. Un froid violent. La mémoire de la peau devance la froidure et le sommeil de l’hiver. La conscience de soi devient conscience de l’espace.
    Pourquoi, vous lisant, je pense à “La chevauchée sur le lac de Constance” de Peter Handke ou à un conte de Grimm ? Car le poème raconte ce qui n’est pas raconté et transforme le réel. Ici une surprise : le givre…
    Je me souviens de ce cavalier perdu dans la brume qui traverse sans le savoir un lac gelé et qui meurt d’apprendre qu’il était en danger, que la glace aurait pu céder.
    Il y a comme un effroi au retour de l’hiver qui clôt la traversée des saisons . Un lent retour. Un paysage de derrière les paupières.

    1. fulgurant commentaire où Peter Handke (que j’aime tant) revient faire son tour à partir de mes mots. Vous élargissez mon propos et je vous en sais gré, car lorsque vous évoquez le retour de l’hiver vous dites carrément ce que je n’ai pas pu articuler.
      Puis vous m’invitez à aller penser plus loin encore. Et après l’hiver qu’y a -t-il? C’est moi qui suggère.
      Je relève avec joie l’expression risquée que vous avancez hardiment : mémoire de la peau. C’est cela même que j’aimerais tant dépasser en posant la question sur l’au-delà de l’hiver. Quelque chose surviendra où nous rouvrirons les yeux.
      Une tiédeur reviendra, 37°, que nous cultiverons à travers les espaces glacés; j’ai profondément admiré ce cavalier qui meurt ….quelle idée magnifique !

  2. Retour à Peter Handke par ce livre que j’aime “Le poids du monde”. C’est un journal écrit entre novembre 1975 et mars 1977, traduit de l’allemand par Georges -Arthur Goldschmidt.
    “Un rêve : marcher constamment et voir apparaître toutes les zones de la vie; la marche s’élargit en un voyage ; le voyage en une traversée du monde (se perdre un jour si loin dans les rêves que l’on ne puisse jamais revenir en arrière : belle folie.)
    Une fois encore l’histoire s’est mise à vivre pour moi – mais une fois encore dans un rêve de guerre.”
    Et si c’étaient eux qui avaient froid, ceux pour qui vous avez écrit Le chemin…
    N’écriviez-vous pas :
    “La bise mord voracement mes joues…
    et gare à celui qui traîne au chemin
    le voilà bientôt pétrifié de giboulées noires
    englouti par le blizzard de minuit”

Les commentaires sont fermés.