dès les rocs de Bellegarde
l’abrupt surgit dans son attente immémoriale
déchiré terrible
effroi des wagons qui les frôlent
la chute au Léman si bien préparée
se fait alors prairie grise et bleue
le lac enfin
miroitements régulièrement intermittents
le regard s’apaise au col des cygnes puis monte
vers pics et monts là-bas
crânes blanchis des saisons
arborant leur abstrait vertical
soulagés par le roulis à mes pieds
oh la neige
qui copie les ciels de décembre
c’est le vieux chant des ruisseaux
cultivé patiemment et tout à coup étranglé
au tendre clapotis de Genève
dans le sourd chuchotis strié des mouettes cruelles
j’admire enfin
la poudreuse fermeté
du jet d’eau trop humain
qui s’en vient ironique
parodier les acrobaties des montagnes
sachant en alpiniste pressé
qu’il n’atteindra jamais l’altitude vertige
modeste mobile immobilité
et trouble comme nos vies
qui sourient bouche pincée
de nos exploits tout relatifs