voyage 3 et 4

voyage 3  

on les aime tout le monde les croit amants 

ils haussent les épaules

 sourient et quand les questions se pressent 

ils quittent brutalement la ferme 

le matin ils apparaissent farouches et minces 

contre l’horizon

ils mendient le pain le travail

 on les a vus se baigner nus dans le ru

 qui chante aux sous-bois 

la peur ne les rapproche pas

 ils grelottent d’être

même en août même au zénith

 ils parlent peu on le leur reproche 

ils rétorquent qu’on ne peut vivre et parler à la fois

voyage 4

ils descendent les cours des rivières

 sans le vouloir leurs phalanges s’effleurent

 ils s’apprivoisent

leurs pas gênés de faire couple s’allègent

 vers le soir leurs ombres se recouvrent

 ils ne le remarquent pas encore

 l’affaire de vivre en gloire à deux cette fois

 revient lui tarauder l’esprit 

la moisson est faite le temps s’ouvre au fleuve

 ils se ramassent se concentrent

 les ponts leur servent de mélodie

 ils sympathisent avec la rumeur des eaux 

les appels crevants des premières mouettes

 leur signalent l’imminence de la cité tremblée