le flanc du cheval quelques fois m’effleure
au pont des décennies
je ne m’en plains pas
je songe aux amis engloutis sans appel
un souffle se suspend
pâle vibration évaporée
cet asthme fait à peine bouger ma vie
pourtant crevée par le travers
le pont grince
je fais face au miroir étoilé
qui craque dans la suite des aubes
brouillage des traits
je ne m’en plains pas
je frémis à l’intranquille des bonjours
le passé et l’avenir s’écartent devant cette pure présence
qui s’installe impavide et toujours changeante
ma voix pointe grave
elle s’enfonce au sillon quotidien
les piles du pont résistent
tourbillons de malice
il me semble qu’on joue là-bas allegro
la pavane pour un cheval noir
je ne m’en plains pas
hennissements à l’horizon
je devine au loin le sourire d’un cavalier encore patient
je sais