iris     

c’est le lys du pauvre

son prestige antique d’arc en ciel

qui relie les dieux et les hommes 

s’efface de nos mémoires

c’était toutes les couleurs dans une écharpe

l’iris projette ce jour dans sa fierté lancéolée 

une coiffure étrange

(elle n’a pas pris le temps de se coiffer)

invitée surprise

elle monte en mai 

et surgissant des parterres 

tire la langue

moquerie ambigüe

on peut la voir masculine

exigeant d’être prise au sérieux

j’attends avec impatience

l’apparition de son violet cardinal

parfois transparent 

dont l’encre à la pointe des boutons

au bord de l’explosion

écrit sur le ciel 

comme les toits des églises

de nos contrées 

aux ardoises mouillées

elle reste si peu parmi nous

qu’elle ne dort pas

dès le soir elle boit l’obscur

le restitue dès l’aube

se dressant en mystère

défi en pleine lumière de l’infini des nuits

je suis son lourd balancement

qui dit oui au vent

et non à la perte des pétales

rejouant un moment 

dans le petit printemps

son rôle d’immortelle