estuaire

une voix murmure

à l’ombre lourde des bouleaux 

pas grand chose

un filet de voix là-haut

parmi le claquement léger des brindilles

où es-tu

tu te souviens des arcs en ciel

douce jeunesse d’oisiveté vêtue 

presque rien sur la peau

la voix passait pourtant à travers

l’ostinato de ma musique 

je n’entendais que la douceur souviens-toi 

je craignais le blafard des habitudes 

la mollesse folle des insultes colportées

nous voguions sur le fleuve gris 

ta voix avait des crudités gentilles 

et sur le flot les tolets de la barque 

grinçaient comme dents de nuit 

ainsi s’écoulaient les jours et nous 

aujourd’hui que le mascaret nous alerte 

en brises menues mais inarrêtables

j’écoute le chuchotis du sang

oreille collée contre ton coeur 

qui fait cascade 

puis presque rien 

intensité du petit reste 

avant le gros bouillon des rencontres

où le salé viendra faucher l’eau douce 

qui nous porte 

il y a urgence

on nous attend à l’estuaire